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Adios, recuerdos
22 mars 2012

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 Je fus donc recalée comme prévu mais j'avais perdu en entrant dans cette classe une année de latin dont j'avais absolument besoin car il y a un océan entre le latin de troisième et celui de première et comme je passais malgré mon échec en classe de première, j'étais au plus mal. Mademoiselle Rostagnat, mon prof de français-latin me fit récupérer cette année en me donnant chez elle gratuitement tous les jeudis des cours particuliers! On n'en fait plus des comme ça, le moule est cassé. Qui plus est, elle me donna le goût de lire Verlaine et Rimbaud, le gentil Rousseau et le méchant Voltaire au nez crochu, le goût de traduire Virgile, Homère, Tite-Live sans oublier Caton l'ancien, le plaisir de lire l'Iliade et l'Odyssée, L'Enéïde, les histoires drôles des dieux et déesses latines, en fait, l'envie d'en savoir toujours un peu plus. Malgré des dizaines d'heures passées à traduire une version latine, je garde en moi l'attrait pour les langues et les livres. C'est grâce à vous, Mademoiselle, que je réussis la première partie du baccalauréat ce 3 juillet 1959 avec d'excellentes notes en français et latin.

La joie d'avoir réussi fut très vite relativisée par mon père qui me dit que si j'avais eu le bac, tout le monde l'avait eu! Bonjour les dégâts! Avant que les épreuves du bac ne commencent, il m'avait menacé de m'envoyer au fond de la mine pour trier des pierres si je ne réussissais pas; il savait de quoi il parlait pour y avoir travaillé pendant de longs mois: Aqui no se crÍan bagos!* L'aurait-il fait? Je l'ignore mais je m'étais dit que si je ratais cet examen, je sauterais le parapet du pont qui enjambe la gare; l'aurais-je fait moi aussi? Encore une question sans réponse mais le fait est que je l'avais envisagé. L'année suivante, après avoir passé le diplôme de monitrice de colonies de vacances, le 21 janvier 1960, je fis donc une colonie des HBL, Houillères du Bassin de la Loire, et non Bernard Henri Levy, en Isère, à Pontcharra sur Bréda. Pendant mes jours de congés, je partais à la découverte de cette région: les Sept laux, le Granier, et au-delà de l'Isère, la Savoie avec son lac du Bourget et celui d'Annecy, Haute combes et tant de jolies petites villes. Moi qui venais du Creusot, région minière comme les Corons de Bachelet avec ses montagnes de crassiers, je fus éblouie par la beauté des Alpes.

Donc, en 1 960, en philosophie, une élève nous proposa des correspondants de Madagascar. L'éloignement, le dépaysement, la curiosité firent que je choisis entre trois candidats celui qui avait le nom le, plus long, le plus curieux, pas moins de douze lettres, au diable l'avarice. J'écrivis donc la première, envoyant ma plus belle photo dans cette colonie que je faisais, assise dans l'herbe car je racontais que j'étais de taille moyenne; mon mètre cinquante neuf d'alors en rougit de honte; à cette époque, nous n'étions pas très grands comparativement avec aujourd'hui. J'expliquais d'où je venais, ce que j'aimais, ce que je voulais faire, ce que je détestais.

 

*ici, on n'élève pas des fainéants!

 

 

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